Jeff Hallam, le caméléon


Depuis leur rencontre en 2009, Jeff Hallam et Dominique A ne se quittent plus vraiment. Présent sur l'enregistrement de Vers les lueurs et d'Éléor, l'américain assure la basse dans la formation actuellement en tournée. Il est devenu un personnage familier pour qui suit Dominique A, tout en gardant du temps pour son projet My Friend Jeff. Son jeu de jambe chaloupé, ses lignes de basse caractéristiques et son enthousiasme en font un personnage attachant. CCV se devait d'aller à sa rencontre, cette fois-ci pour de bon puisque lors d'un premier rendez-vous sur une terrasse bretonne, l'enregistreur restera sur pause durant toute l'interview... Pas rancunier Jeff !



Ceux qui suivent Dominique A depuis des années te connaissent, peux-tu présenter ton parcours et ta formation musicale pour le nouveau public qui découvre Dominique A avec Éléor ?

Je viens de Portland dans l’Oregon, j’ai un peu vécu au Japon et ensuite je me suis installé à Paris, cela fait maintenant 14 ans ! J’ai commencé par jouer dans la rue de la contrebasse dans un groupe de jazz, puis les tournées ont débuté petit à petit avec des groupes, et maintenant c’est la grande scène avec Dominique A ! Bon, je résume là 14 années de musique, mais entre temps il y a eu beaucoup de soirées dans des bars pourris à Belleville que j’adore, mais oui, ce ne fût pas si rapide que ça, ce fût même un processus assez lent.

Quels sont tes modèles ? Je me souviens qu’à Toulouse au Bikini à l’occasion d’une date avec Dominique A (en octobre 2012) tu avais appris que Joe Jackson jouait la veille dans la même salle, et tes yeux s’étaient alors mis à briller …
Oui c’est vrai je me souviens ! Il y a deux artistes qui m’inspirent, qui m’ont modelé, ce sont Joe Jackson effectivement et Elvis Costello. Je les ai écouté très tôt, et ce sont des références pour mon travail en tant que bassiste et pour la musique que j’écris. Il y a bien sûr d’autres artistes qui ont été importants dans mon parcours, mais ceux sont les deux grands pour moi. On pourrait parler de soft punk, mais il y a plein d’autres choses dedans : du rock, du motown, du reggae, du jazz... Joe Jackson a d’ailleurs sorti un album de jazz avec Joe Jackson’s Jumpin Five, et il avait aussi repris la photo d’un album de Sonny Rollins pour un de ces albums (Body and Soul).



La rencontre avec Dominique A date d’avril 2009 ? Tu peux nous raconter ?
Dominique faisait une carte blanche à la Ferme du Buisson à Marne-la-Vallée (avec Philippe Poirier, Jérôme Minière, Pierre Bastien, Marc A. Huygens, Chapelier Fou…). Patrick Lerch, un belge qui fait de la poésie était invité et il cherchait un contrebassiste pour faire quelque d’un peu free autour des textes lus. C’est Sébastien Buffet, qui commençait de jouer avec Dominique qui m’a conseillé, et c’est parti comme ça. J’ai rencontré Dominique à cette occasion, et le courant est très vite passé, on a beaucoup discuté, et ça s’est fait très simplement. Peut-être que nous avons parlé d’Elvis Costello et de Joe Jackson, je ne sais pas, je ne m’en souviens plus !

Le groupe actuel qui entoure Dominique A est un sacré mélange, c’est un amalgame de différentes époques : Sacha Toorop est l’ancien (présent déjà sur la tournée de la Mémoire Neuve), Boris Boulbil est le dernier arrivé avec Éléor, et toi tu te situe entre les deux.
Oui c’est ça, Sacha est le son un peu historique de Dominique A pour la batterie, et Boris apporte une nouvelle touche. Bon pour Boris on se connaissait déjà, il a pas mal joué dans mon groupe My Friend Jeff, ou dans le sien Atlas Crocodile, et on a aussi notre projet commun de Playing Carver. Je l’ai présenté à Dominique A, et ensuite ils se sont revus plusieurs fois, et voilà, maintenant il est avec nous. Pour la batterie, Dominique A et Dominique Brusson pensaient que le son de Sacha pouvait bien s’accorder avec moi. Et effectivement dès la première répétition, ce fut direct entre nous. Peut-être parce que nous avons un peu le même rapport à notre instrument. Sacha m’a dit qu’il était derrière une batterie un peu par hasard (il a commencé avec Dominique A en tant que bassiste), et moi c’est pareil pour la basse ! Du coup, je me sens un peu comme un pont entre Sacha et Boris, et c’est extrêmement confortable pour moi.




La tournée de Vers les lueurs a débuté avec beaucoup d’éléments sur scène, puis vous n’étiez plus que cinq sur scène. Là vous êtes quatre, c’est donc plutôt resserré. Est-ce que cela réduit les possibilités en concert ?
Non pas vraiment, au contraire, cela offre plus de liberté. Par exemple sur certains titres de la tournée précédente j’entends encore la guitare de Thomas Poli, des parties que maintenant je m’approprie. Et même si Vers Les Lueurs était très riche musicalement, là avec en plus l’arrivée de Boris Boulbil aux claviers et à la guitare, c’est une autre façon de travailler, de faire les arrangements. Bon ok, je suis le bassiste, c’est mon rôle sur cette tournée, mais je trouve que j’ai plus d’espace.

D’ailleurs tu n’as plus la contrebasse sur cette tournée ?
Oui c’est un choix. Je l’utilisais assez peu sur la tournée Vers les lueurs, et je trouvais cela un peu haché. Et puis ce n’est pas anodin de prendre une contrebasse sur une tournée, c’est une grande Dame ! Et pour deux morceaux, cela ne vaut pas trop le coup. Je n’ai qu’à faire des tremolos sur ma basse avec un delay très long !

J’imagine que tu as parfois du mal à te souvenir de toutes les dates de concert, mais peut-on revenir sur la première à la Carène de Brest ?
Jeff HallamOui je m’en souviens encore bien sûr. Il est d’ailleurs peut-être question que l’on finisse cette tournée à Brest, là où elle a commencé, mais ce n’est pas confirmé. Et si tu me reposes cette question là-bas, je te dirai certainement que je ne me souviens pas de cette première !! Mais là oui, je m’en souviens. C’était chouette. J’aime bien la ville, les Brestois. Y’a une culture musicale là-bas qui est agréable. On sortait de cinq jours de résidence là-bas, avec toutes les nouvelles chansons, et d’autres plus anciennes que je ne connaissais pas du tout. Bon c’était un peu frais, mais parfois, c’est bien de ne pas trop connaître ton set, ça peut sortir de bonnes choses. Ou pas (rires) !

Vous n’allez pas reprendre à nouveau le Twenty-two bar en duo ?
Aucune idée. C’est une drôle d’histoire. En fait, c’était à la fin de la tournée de Vers les lueurs avec les vents, après le concert de Lyon, on était dans un bar, et Dominique A me propose de reprendre ensemble cette chanson. Bon je croyais que c’était une blague, moi reprendre la partie de Françoiz ? Mais non, ce n’était pas une blague…

On disait tout à l’heure qu’avec Sacha, Boris et toi vous couvrez différentes époques. Du coup comment se fait le choix des morceaux sur scène, au delà de la présentation d’Éléor ?
Dominique est très ouvert. Il nous demande ce que l’on a envie de jouer dans les anciens morceaux. Le métier de faussaire est un titre que l’on jouait, et que j’adore, mais Sacha connaît bien sûr mieux le vieux répertoire et a apporté d’autres idées. Par exemple Retrouvailles, que je ne connaissais pas, possède cette même énergie, elle déchire cette chanson ! Du coup c’est assez ouvert. Mais maintenant je me rends aussi compte de l’attente du public pour certains titres de Vers les lueurs, un album auquel j’ai participé, tel que Ce Geste Absent ou Le Convoi.

Pour cette tournée, il y a une différence pratique, vous voyagez entre les villes en tourbus. Vous partez après le concert en bus dans lequel vous dormez, alors qu’avant vous dormiez à l’hôtel après le concert et faisiez la route au petit matin. Qu’est ce que cela change pour vous ?
Ca change pas mal en effet. Ca me fait bizarre de partir d’une ville et de me réveiller dans une autre. Hier par exemple, lorsque j’ai fermé mes yeux on était à Grenoble, et lorsque je les ai rouverts, on était à Toulouse. C’est assez déstabilisant. Hormis ça, c’est vrai que c’est bien. Les musiciens ont ce rêve de voyager en tourbus. Même si ce n’est pas très simple parfois, il y a moins d’intimité par exemple, c’est bien, toute l’équipe s’entend bien.



Tu as joué aux Etats-Unis, au Japon, En Espagne, au Maroc même, etc. Il y a des spécificités entre tous ces différents publics ?
Bon Dominique A a pas mal de succès en Espagne. C’est assez marrant parce que les textes sont très présents chez lui, et il y a la barrière de la langue, les gens ne comprennent pas forcément mais l’énergie que dégage Dominique est suffisante. C’est toujours la folie là-bas, le public est vraiment frontal, c’est super.

Myfriendjeff EPFaisons le point sur tes projets musicaux : My Friend Jeff, Playing Carver, Atlas Crocodile, Zsuzsanna Varkonyi…
L’actualité c’est surtout My Friend Jeff, un groupe dans lequel Boris Boublil participe. On a sorti un EP en septembre dernier. On a un nouveau EP et des remix qui sortiront à la rentrée. C’est un challenge de tourner avec Dominique A et faire vivre My Friend Jeff, mais on arrive tout de même à faire un concert par mois à Paris. Il y a aussi Playing Carver qui est un collectif avec Boris Boublil, John Parish, Marta Collica, Gaspard LaNuit… Nous jouons autour de l’œuvre de Raymond Carver. On a sorti un album « Leave the door open » en octobre dernier.







Ces différents projets t’exposent différemment. Ca te va bien ce rythme différent, ce côté ombre et lumière ?
En fait je fais plein de choses dans la musique. Je suis réalisateur, ingénieur du son, bassiste et artiste, j’ai plein de casquettes, et c’est ça qui est très intéressant. Je suis un peu comme un caméléon, qui joue de la basse derrière au service de quelqu’un que j’adore comme Dominique A ou qui prend le micro pour aller devant pour My Friend Jeff, ou qui écrit des paroles, ou qui fait l’ingénieur du son pour un autre artiste… Et ça, ça me va bien.

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