Allons Voir Ailleurs #3 : Pelouse

Pelouse invité de Dominique A ©Pierre Acobas
Cela fait bien longtemps que je ne me suis plus manifesté sur ce site. Parfois l’envie me prenait d’écrire quelque chose et de le soumettre à Sam et Yvan, et puis je me faisais rattraper par la vie, la paresse… La situation n’a que trop duré ! Régulièrement, des musicien.ne.s, ami.e.s, ami.e.s d’ami.e.s ou que je ne connais pas, m’envoient des liens vers des musiques qu’ils ou elles produisent. Et régulièrement, je me fais cette réflexion que ce que j’entends alors mérite d’être davantage exposé. Maintenant que plus que jamais les musiques indépendantes d’obédience pop rock chanson sont revenues à la marge, toute occasion de pointer un petit projecteur sur elles n’est pas à négliger. D’où le but de cette nouvelle rubrique mensuelle en direction de vos oreilles, sans commentaires de ma part, et assortie d’un questionnaire type.

Dominique A

 

Pelouse BowlingDominique A : Peux-tu nous donner quelques repères de ton parcours ?
Pelouse
: PELOUSE est né en 2017. J’ai proposé à Valentin Ceccaldi et Quentin Biardeau, tous deux issus des musiques improvisées et du jazz contemporain, d’embarquer dans cette histoire. J’avais envie de quelque chose de très brut, de très minimal, et nous avons monté notre premier répertoire avec cette idée. Un violoncelle, un clavier, un sax et ma voix. Après un premier EP et une trentaine de dates (dont quelques premières parties avec toi), nous avons travaillé à la production de notre album qui est sorti en septembre 2021 : Bowling (clin d’œil au fait qu’on a passé notre vie de tournée à écumer tous les bowlings de France). Pour la tournée, Valentin est devenu conseiller musical, laissant la place sur scène à Martin Debisschop, bassiste, qui a amené une couleur plus rock et son expérience des musiques expérimentales. Nous avons aussi été rejoint par Emmanuelle Joubier, éclairagiste, qui offre à notre musique un déploiement plus onirique sur scène.


Avez-vous une actualité, et si oui, laquelle ?
La tournée continue en 2022 et des clips vont sortir dans les mois à venir. 
Pendant ce temps, je commence à écrire le prochain album qui sortira fin 2023. Je continue à chercher cette ambivalence entre poésie, absurde, politique et surréalisme. Grand chantier en perspective ! L’étape d’après sera l’épreuve de l’écriture musicale en équipe. 

Que cherchez-vous à faire musicalement ?
Les propositions cycliques et répétitives des compositions de Valentin et de Quentin, l’interprétation rock de leurs traductions à la basse de Martin et la recherche de sons singuliers électro de Quentin (et son travail sur le souffle continu au sax) créent une musique plutôt hybride et organique. On travaille beaucoup sur la matière sonore. Le travail avec nos ingés son (Mathieu Pion pour les disques et Johan Caballé pour la scène) est primordial dans ce qu’on fait. 

Quelle place accordez-vous au chant et à la langue dans ce que vous proposez ?
La langue est centrale dans PELOUSE. Les textes sont toujours le point de départ de chacun de nos titres. Avant de composer, on parle beaucoup de ce que ces mots nous racontent, de comment la musique va pouvoir les mettre en tension. Concernant le chant, c’est pareil. Je le mets toujours au service de ce qui est raconté et non au service de ma voix. 

PELOUSE © Pierre AcobasPELOUSE © Pierre Acobas

© Pierre Acobas


L’écriture, textuelle et musicale, est-elle ou non douloureuse pour vous ? Etes vous plutôt instinctifs ou laborieux ?
Pour les textes, c’est assez douloureux. Et j’ai l’impression que ça prend de plus en plus de temps avec les années ! C’est aussi la nécessité de la solitude pour écrire qui est souvent vertigineuse. Ce que je trouve toujours le plus intéressant, c’est quand un texte jaillit à un moment imprévu. Mais pour que ces moments puissent survenir, je crois qu’il faut se contraindre à écrire beaucoup. Un certain labeur donc pour que l’instinct trouve sa place.
Pour la musique, de mon point de vue, c’est plus simple parce qu’on compose en groupe. Alors, on essaie, on rebondit, on échange. Quentin, qui passe pas mal d’heures en préproduction derrière son ordinateur, tout seul, dirait peut-être autre chose cependant…

De quelle façon le contexte de ces deux dernières années a-t-il eu une incidence sur votre façon d’envisager le travail musical, sur le plan artistique et/ou financier ?
La nécessité d’adaptation permanente ces deux dernières années est éprouvante pour nous tous. Pour autant, on n’a pas vraiment eu envie de changer entièrement nos pratiques et nos façons de voir les choses : assez simplement, on a continué à faire des chansons pour pouvoir les chanter à des gens. On a donc refusé les live-streams et on a travaillé dur pour préparer nos retrouvailles avec le public. Ce qui a finalement pu avoir lieu cet automne. 

 

 

Envisagez-vous votre activité sous un angle social et/ou politique ou uniquement artistique ? 
Je ne sais pas si c’est dissociable. Quand j’étais ado, ma sœur me ramenait des cassettes et j’ai écouté énormément de choses qui ont eu une influence énorme sur ce que je suis aujourd’hui (et pas uniquement professionnellement). Mes lectures ont forgé ma conscience politique. Et je pense que toute œuvre artistique peut résonner fort pour construire quelqu’un. En cela, il me semble que faire de la musique devient politique, et social aussi, puisqu’il conditionne notre manière d’être au monde.

Qu’attendez-vous du « monde de la musique » pour diffuser la votre? Idéalement, vous aimeriez fonctionner dans quel cadre (contrat avec un label, en indépendant, en licence…) ?
On s’est structurés en compagnie, une administratrice de production nous a rejoint l’année dernière. Un label indépendant a coproduit Bowling et on a été bien entouré pour les aspects « promo ». Si on regarde le « monde de la musique » tel qu’il existe aujourd’hui, ce qui nous manque vraiment, c’est un tourneur qui puisse défendre notre proposition de manière plus large et plus soutenue que ce qu’on fait aujourd’hui.

PELOUSE © Pierre AcobasPELOUSE © Pierre Acobas

© Pierre Acobas

 

Penses-tu que la scène soit une finalité ?
Oui. C’est passionnant de faire des disques. C’est très gratifiant de savoir sa musique écoutée. Mais monter sur une scène pour partager des chansons, c’est au-delà, bien au-delà. La scène est un endroit où on peut chercher à vivre une expérience collective intense avec le public. Et tâcher de trouver la justesse pour que ces moments nous rendent profondément vivants. 

On vous propose 100000 euros pour produire ou diffuser votre art ? Qu’en faites-vous ?
Je dirais qu’on commencerait par payer tout le monde à la hauteur du travail fourni. Et que ça nous permettrait de pouvoir pousser encore le curseur de l’exigence et de passer plus de temps à tout construire.  

 

 

Dans quelle mesure penses-tu que la musique gagne à être commentée, faire l’objet d’articles, de livres … ? 
J’ai toujours préféré écouter un disque que lire un papier qui parle d’un disque. Pour autant, si le journalisme musical n’existait pas, je serais passé à côté de pleins d’artistes que j’adore absolument. Et dans la profusion de la production ces dernières années, il est difficile de s’y retrouver sans être un peu guidé.

Veux-tu ajouter quelque chose ?
Oui. La question précédente me donne envie de tourner le projecteur vers d’autres. Alors voici ce que, aujourd’hui, j’aurais envie de vous conseiller : 

  • lire le court roman « Sucre de Pastèque » de Richard Brautigan, paru en 1968
  • voir La Chica en concert solo piano-voix, sur la tournée de son très bel EP « La Loba »
  • écouter le merveilleux disque de Gilles Poizat « Horse in the House », sur des poèmes de Galen E. Hershey

 Brautigan

 

 
Gilles Poizat

 


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